SIAO Paris

Le CHU Agnodice, l’autonomie pour restaurer l'estime de soi

Situé dans le 5e arrondissement de Paris, ce centre d’hébergement a démarré son activité le 27 décembre 2021. Il accueille et prend soin des femmes enceintes ou à la sortie de maternité. Aude Tchekhoff, coordinatrice SIAO Paris (hébergements spécifiques) explique que de nombreuses femmes en situation de précarité n’ont nulle part où aller avec leur nouveau-né. A la suite d’un appel à projet lancé par L’État pour remédier à cette situation, quatre structures ont été retenues dont le CHU Agnodice*. Aujourd’hui, ce centre héberge ces femmes mais aussi les papas et les enfants d’une même fratrie. Interview de Laurent Tasbasan, directeur adjoint du CHU Agnodice (Pôle Joséphine Baker).  

Ce CHU est à la fois un centre d’hébergement mais aussi un lieu de soin ?

L.T : Une femme seule avec son enfant occupe un appartement d'une pièce, avec une salle de bain et des toilettes. La cuisine est partagée avec une autre maman et son enfant. Un couple avec plusieurs enfants bénéficie d'une pièce supplémentaire et une cuisine exclusive. Toute l'équipe du CHU est située au rez-de-chaussée et les familles sont logées dans les étages, de sorte que les travailleurs sociaux ne s'immiscent pas dans leur espace de vie. L’autonomie restaure l'estime de soi.

Nous avons également sur place une équipe pluridisciplinaire composée d’une infirmière, une psychologue, deux auxiliaires de puériculture, une éducatrice jeune enfant, bientôt une ostéopathe et trois travailleurs sociaux qui sont les référents de parcours en action sociale globale. Sans oublier une équipe d'accueil qui tourne 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. 

Quel est votre constat en termes de santé pour ces femmes enceintes ou leurs nouveaux nés ?

L.T :Beaucoup de familles ont vécu dans la survie avec pour seule préoccupation : « Où pouvoir dormir en sécurité et comment manger… ? » La santé a donc été complètement balayée. Avec la mise en place d'un suivi de leur santé, nous nous apercevons qu'il y a du diabète gestationnel, jamais d'échographie de faite. Les accouchements prématurés ne sont dès lors pas anodins. Nous sommes face à des situations assez difficiles mais ces familles reprennent espoir de jour en jour.

Quel avenir pouvons-nous espérer pour ces familles logées temporairement ?

L.T : On prévient les familles dès leur admission que notre objectif est de remettre en place un parcours de soins, de sécuriser la maman en apportant tout l'étayage médico-psychologique à la naissance de l'enfant. Nous n'avons pas vocation à accueillir ces familles sur le long terme. Un CHRS avec une durée d'hébergement plus longue sera sans doute plus adapté.

Le CHU Agnodice peut-il être un centre référent à l’avenir ? 

L.T : Il est possible que ce modèle soit inspirant. En tout cas, c'est un vrai besoin. Ce CHU existe depuis quelques mois, et il est déjà plein ! On doit travailler avec le SIAO d’arrache-pied pour avoir un protocole qui favorise la fluidité de notre établissement. Si nous souhaitons continuer à soutenir toutes ces femmes enceintes, des places doivent se libérer. Nos résident.es en sont conscient.es, je les ai entendus plusieurs fois dire : « C'est normal qu'on laisse la place. »

*Agnodice est considérée comme la première femme médecin européenne (vers 350 av. J.-C).